Mémoire sur le projet de loi C-12 présenté au Comité permanent de l’environnement et du développement durable
Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) est la plus grande unité de négociation au sein de Postes Canada. Il compte plus de 61 000 fiers membres ayant à cœur l’avenir de la société d’État.
Nous avons élaboré une vision d’avenir audacieuse et inspirante pour le service postal public, qui sera une source de fierté, de confiance et d’inspiration pour toute la population. Notre campagne « Vers des collectivités durables » (1) cadre parfaitement dans une relance post-covid juste, équitable et verte.
Outre notre vision de diversification des services pour accroître la présence fédérale au sein du réseau de plus de 6 100 bureaux de poste et ainsi fournir des services de proximité, un large volet de notre plan vise à faire de Postes Canada un leader et un exemple pour toutes les entreprises dans l’atteinte des objectifs fixés dans le projet de loi C-12.
Au Canada, le service postal public, de par la nature de son mandat, exploite le plus grand parc de véhicules polluants, après celui des forces armées canadiennes. Postes Canada détient plus de 13 000 véhicules, sans compter les 7 000 véhicules des factrices et facteurs ruraux et suburbains (FFRS).
Postes Canada est un levier puissant pour mener la charge contre les gaz à effet de serre. Postes Canada peut être un symbole fort de notre ingéniosité.
Alors qu’il y a un consensus mondial et que les gouvernements du monde se sont fixé des objectifs précis afin d’éviter une catastrophe écologique, le projet de loi C-12 laisse encore beaucoup trop de marge de manœuvre au gouvernement et risque de saper l’adhésion aux mesures nécessaires.
Il serait important que le cycle de responsabilité du gouvernement soit aligné sur le processus d’évaluation quinquennal de l’Accord de Paris. Cela permettrait de mieux comparer et évaluer les objectifs, et rehausserait nos cibles sur un cycle commun.
De plus, le projet de loi ne fait aucun lien entre la planification de l’objectif de carboneutralité et les processus de planification d’une transition juste et équitable pour la main-d’œuvre afin de garantir de bons emplois à tous les travailleurs et travailleuses quand surviennent des changements sociaux et économiques. L’atteinte de l’objectif de carboneutralité du Canada doit se faire main dans la main avec les travailleuses et travailleurs, ce que devrait refléter le projet de loi.
Enfin, le projet de loi C-12, selon le communiqué du gouvernement, obligera le ministre des Finances à publier un rapport annuel décrivant les principales mesures prises par les ministères et les sociétés d’État pour gérer les possibilités et les risques financiers liés aux changements climatiques.
Nous prenons acte des nouvelles obligations proposées, et comprenons que l’imputabilité et la reddition de comptes sont des éléments essentiels à l’atteinte des objectifs de réduction des gaz à effet de serre. Cependant, nous voulons souligner qu’il n’y a aucune mention des sociétés d’État dans le projet de loi C-12.
Déposée en 2020, la Stratégie pour un gouvernement vert, sous la responsabilité du Secrétariat du Conseil du Trésor, mentionne le rôle des sociétés d’État.
« On encourage les sociétés d’État qui possèdent des biens immobiliers et des parcs de véhicules substantiels, et qui gèrent des processus d’approvisionnement importants à adopter la Stratégie pour un gouvernement vert ou à prendre un ensemble équivalent d’engagements, y compris celui d’atteindre la cible de zéro émission nette d’ici 2050. » (2)
Étant donné l’urgence de la crise climatique, l’heure n’est plus à l’encouragement. L’obligation de résultat est notre seule option. Et nous voulons que cette obligation soit reflétée dans le projet de loi C-12.
Électrification des véhicules : la différence entre encourager et obliger
Voici un portrait contemporain de ce que peut représenter un encouragement sans imputabilité ni lignes directrices claires. Postes Canada est encore au stade des projets-pilotes pour l’électrification de sa flotte, alors que l’on constate que General Motors a conclu une entente (4) pour transformer une usine d’assemblage de véhicules polluants afin de construire, au Canada, des véhicules de transport et de livraison légers qui sont carboneutres. Au Québec, l’usine de Lion Électrique vient de signer une entente (5) avec l’entreprise Amazon afin de livrer des milliers de véhicules de transport lourds électriques.
En attendant les résultats de ces projets-pilotes, Postes Canada a déployé 374 véhicules hybrides pour l’année 2019. Non seulement il s’agit d’un nombre insuffisant, mais de plus, il est inconcevable que Postes Canada se tourne vers une technologie qui n’est plus optimale vu les avancées dans le domaine des véhicules carboneutres.
Le gouvernement vise à réduire de 40 à 45 % les émissions des gaz à effet de serre d’ici 2030 (6) et à atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Ces échéances sont à nos portes et nous devons tous mettre la main à la pâte, y compris les sociétés d’État. À Postes Canada, l’électrification des transports est primordiale à l’atteinte de nos objectifs.
Chez nos voisins du Sud, la nouvelle administration Biden a adopté un décret qui engage les sociétés fédérales à l’électrification de leurs parcs de véhicules. Le United States Postal Service n’est pas exclu de cette obligation. Il vient d’ailleurs d’annoncer un contrat d’achat de 165 000 véhicules d’ici dix ans auprès de l’entreprise Oshkosh. L’administration Biden financera cette transition obligatoire (7). Voici l’exemple d’un gouvernement doté d’un leadership et d’objectifs précis pour son service postal public.
L’électrification de la flotte de véhicules de Postes Canada ne contribuerait pas seulement à diminuer directement les émissions de GES. Elle encouragerait également des diminutions indirectes en favorisant une perception positive des véhicules électriques.
Des milliers de véhicules électriques aux couleurs de Postes Canada qui sillonnent les collectivités d’un océan à l’autre, créant un puissant symbole de fierté et de réussite.
Bornes de recharges
L’électrification du parc de véhicules de Postes Canada devra s’accompagner de l’installation de bornes de recharge dans l’ensemble de ses 6 100 bureaux de poste. Le STTP a déjà effectué des recherches sur les bornes de recharges, soit un système accessible au public le jour, et réservé aux véhicules de Postes Canada la nuit.
Le secteur manufacturier des bornes de recharge est florissant au pays. De bons emplois dépendent de la croissance de ce secteur. Pour la relance économique, il ne fait aucun doute que l’investissement dans les énergies vertes pourra soutenir la main d’œuvre des industries dépendantes des énergies fossiles.
En conclusion, le gouvernement fédéral doit démontrer un leadership fort. L’heure n’est plus aux demi-mesures. En ce sens, toutes les forces du pays doivent se concerter. L’encouragement ne suffit plus. Il nous faut des lois contraignantes.
Recommandation :
Le STTP, appuyé par ses membres fiers et ayant à cœur de réinventer Postes Canada et de réduire son empreinte carbone, recommande au Comité l’amendement suivant au projet de loi C-12 :
Le projet de loi C-12 doit obliger les sociétés d’État à rendre des comptes en prescrivant des normes minimales strictes pour la planification et les rapports, et en imposant l’obligation légale d’atteindre les cibles établies.
Nous vous remercions de prendre en considération notre mémoire et d’apporter les modifications qui précèdent au projet de loi. Tous les Canadiens et Canadiennes vous en seront reconnaissants.